04 décembre 2022
Je termine mon parcours, de retour à Surin, dans l’est du pays, exempt de farangs, ennui assuré sans la présence de June, ma fidèle accompagnatrice et guide bienveillante. Je persiste à croire que le Siam est l’endroit qui me convient. J’aime ces gens, même s’ils ne sourient pas si souvent qu’on le dit. La fameuse résilience si bien décrite et développée par Boris Cyrulnik fait partie de ce monde-là. Accepter et s’adapter aux contraintes qui paraissent insurmontables. J’ai fait mon bout de chemin, mais je suis loin, très loin d’avoir atteint, comme mon amie June et la plupart des Thaïlandais, le degré d’adhésion à cette culture de la sérénité. Impatients, grognons, égoïstes. Quoi que l’on fasse, nous occidentaux, baignés dans le lait de la controverse, on a toujours, et malgré nous, un petit diable contestataire (qui ressemblerait à Mélenchon) trainant dans le creux de notre oreille. Déception n’est pas de mise pour ceux qui, comme moi, ont la chance de pouvoir voyager. Vous savez, c’est comme la goutte de café restant sur la cuillère et que l’on a envie de récupérer en y affleurant délicatement le bout de celle-ci sur la surface mousseuse de notre tasse. C’est un réflexe dérisoire qui n’apporte que la sensation de n’avoir rien laissé échapper. Et puis je l’ai laissée tomber, ne sentant plus cette pression de la main s’exercer sur ce petit ustensile. J’ai essayé de la rattraper, cette petite cuillère. Il y en avait partout, du café brulant sur mes genoux, des débris de tasse sur le sol, et mes yeux qui s’affairaient au regard des autres, condamnant par avance ma sotte maladresse. C’est la dernière image qui me restera de ce dernier voyage. Mal préparé, sans objectif précis, indécision permanente, dans un pays où rien n’arrive comme on l’entrevoit, où tout se réalise sans que l’on en soit toujours acteur. A vrai dire, ce séjour restera inachevé. Comme mon carnet de voyage qui n’a pas suscité grand intérêt, et pour cause. Il était trop personnel et ne m’a pas permis de partager des intérêts géographiques et sociologiques de la région. Il faut dire qu’il a plu pendant les cinq semaines que j’ai passées à Phuket. Exit, les excursions et les visites des merveilleuses iles du Sud de la Thaïlande. Arrivée massive des touristes faisant ressembler ses si belles plages à celles de la méditerranée en plein mois d’aout avec transats et parasols. J’ai cependant rencontré ces gens, ces français, expats ou touristes, qui me ressemblent, que je n’aurais sans doute jamais croisés ailleurs, qui vous parlent comme ils vous aiment, protecteurs et sans préjugés. Lolo, Bernard, Alain, Patrick, Tonton, Greg, Dominique, Chris, et bien sûr Jess et Déborah. Pour eux, cela valait bien ce détour de notre monde.
Ces lignes concluent mon dernier carnet de voyage.



















