Ne me juge pas. Ne me méprise pas. Ecoutes moi d’abord. Lis-moi. Après, je te donnerai mon âme.
Je suis né au mois de mars, juste avant le printemps. Je dis cela car je suis un prématuré. Sept mois. J’aurais pu être un Taureau. Combattant. Un « sûr de lui ». Au lieu de ça, je suis un Poisson. Inquiet. Sensible. Tourne en rond. Y-a pas de hasard.
Arrivé en avance. Ca m’a aidé. Toujours ponctuel. Avant l’heure aux rendez-vous. Y-a pas de hasard.
J’étais quand même très fragile. Intoxication alimentaire. A l’époque, pas de date sur les œufs en vrac. Mes frères et moi, tous malades. Ambulances, hôpital… mais moi j’ai payé les complications, je ne suis pas rentré tout de suite à la maison. Ca a duré. Mes premières dettes médicales.
Argenteuil, square Locarno. Vie de famille ordinaire, du moins c’est ce que ma mémoire me souffle. Les enfants, nous étions dix. Des parents aimants, mais fatigués par le parcours d’un rapatriement de Tunis, à l’installation dans ce pays à peine sorti de la période brune. Celle où les anciens protectorats réclamaient leur émancipation.
Ils nageaient entre deux eaux, Maman et Papa. Le souvenir de leur bonheur ensoleillé ne comblait pas ce vide d’une banlieue encore humaine, mais déjà grise de cette région tempérée, dont l’odeur de bitume à peine refroidi hante encore aujourd’hui mes narines. Le souvenir c’est d’abord le parfum. Plutôt l’odeur.
Nous étions tous là maintenant, même si une partie d’entre nous allait quitter rapidement le cocon familial.
En chemin, Papa nous tenait la main. Nous étions quatre, chacune de nos mimines se relayait pour attraper un doigt de notre papa.
Papa, c’était « Le Vieux » de Daniel Guichard. Pardessus rapé et tristesse infinie de nous confier à Sarah, la Directrice de notre nouvelle maison.
Une maison d’enfants dans laquelle il faudrait grandir un peu plus vite.
J’avais sept ans. Je suis sorti à dix neuf ans. Je ne m’attarderai pas sur cette période. Pas de mauvais souvenirs. Pas de très bons non plus. Sauf, les vacances à Marseille, tous les ans. Les premiers amours. Les premiers vents aussi. Pas les derniers.
J’ai grandi sans faire de bruit. Sage comme une image. Ayant acquis cette assurance crasse des ados orgueilleux de leurs flirts naissants. Je m’en rends compte aujourd’hui.
Maman et Papa sont partis vite, très vite, sans nous avoir appris les codes.
Il m’en restera, pendant des années, la sensation de n’être jamais à l’aise dans la société ordinaire.
Dimanche 02 Juillet
Monsieur ! Billet s’il vous plait !
Je me suis endormi. Dans le train pour Paris.
Je vais chez ma sœur. Tant de personnes à voir. Ma famille, mes amis.
Et la rencontre à l’IGR. Entre patients souffrant des cancers ORL rares, des intervenants soignants et chercheurs. Organisée par l’Association CORASSO.
Lundi 03 juillet.
Superbe journée. Beaucoup d’interventions. J’en recueille essentiellement la force de notre rencontre informelle. Voir tous ces visages ne démentant pas l’impression virtuelle de nos échanges sur les forums sociaux. Sabrina, Tijana, Jean-Marc, Sami, Marion, Christine, Chantal et j’en oublie.
Tant d’histoires particulières, de peur, de souffrances et d’espoirs quelquefois.
Je ne l’ai pas ramenée. Ca vous cloue le bec du plus doué des boute-en-train.
Je n’étais pas très à l’aise, il est vrai.
Ma sonde associée à ma lithiase en sentinelle m’a rappelé à l’ordre des précautions nécessaires. Boire beaucoup (de l’eau) et faire pipi souvent. Malgré mon verre de whisky avalé à la hâte et deux tramadol de 50mg, je n’en menais pas large.
Mais j’ai fait bonne figure. On m’a trouvé plutôt en forme.
La Bourse (les) en baisse, liée à une vessie encombrée, le tout associé à un CAK 40 (Carcinome Adénoïde Kystique) en berne, ca vous gâche une journée !
Ma sœur m’a reçu comme un prince. Elle, comme une mère, une amie, une infirmière et une sœur.
Puis mes frères, mes nièces, mes amis. Tous là. Pour moi.
Je n’ai pas mérité tout ça. Je suis juste malade.
Beaucoup d’autres ont payé cher cette année.
Comme disait Coluche, les héros c’est ceux qui sont toujours là.
Les autres, ceux qui sont partis. On les pleure et parfois on les oublie.
C’était pour vous détendre avant les vacances.
en espérant que t’en a bien profité à Paris et que ton travail de groupe porte ses fruits. A bientôt max
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Merci
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Bcp de pudeur dans ton texte mais on n’y retrouve ta sensibilité, ta gentillesse ta retenue mais surtout ton courage
Je t’embrasse
Magali
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Merci Magali 😏
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Bcp de pudeur dans ton texte mais on n’y retrouve ta sensibilité, ta gentillesse ta retenue mais surtout ton courage.
Je t’embrasse
Magali
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Je te suis Max.
On en reparlera des « Jistel », et du temps où nous étions jeunes et b…
Etonnant, non, quand on s’est rendu compte qu’on faisait le même boulot ?
A bientôt, du côté de Montpellier…
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Merci Jean Marc. Je t’attends. Porte toi bien (dans la mesure du possible)
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Ce texte me provoque une vive émotion. Je fais appel à mon cerveau pour trouver des mots percutants. Mais il reste muet, sous le choc. J’ai connu ce retour ds la grisaille d’un hostile petit village français. Puis Sarcelles et enfin Paris. Une enfance triste au sein d’une famille désunie. Mais je suis sortie plus forte, plus battante. Je suis née en Kabylie et mon mari en Tunisie. Hasard de la vie… Moi aussi le 3 juillet dernier, je n’ai pas parlé. Je ne connaissais personne, du moins 1 seule personne pas… J’avais des effets secondaires liés à ma chimio et j’étais contrariée. Mais j’ai fait de tres belles rencontres. Je pense notamment à Lorraine, Sabrina, toi et j’en oublie tant d’autres !
Je n’ai pas envie de poser la question de ta radio aujourd’hui. A très bientôt
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Merci Chantal. Prends soin de toi.
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Pour aujourd’hui, j’ai une ordonnance extraordinaire. Celle d’aller voir « visages, villages » de Varda et JR (tiens, un Tunisien). 2 artistes fantastiques avec un documentaire où se mêlent le rire et l’émotion. C’est beau et ça fait du bien !
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Me raconteras-tu ?
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Oui je te raconterai. Avec le recul (je suis très impulsive), je trouve que mon ordonnance est déplacée.
Cela fait 9 ans que je vis avec mon nouveau visage et parfois je l’oublie. Je suis désolée et j’espère que je ne t’ai pas froissé.
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Je n’avais pas compris la tournure de ta phrase. Donc, tu as vu ce film et tu voudrais que je regarde ? Je vais me renseigner. Non tu ne m’as pas vexé, ne t’inquiètes pas. 🙂
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